La Petite Bande aura 50 ans et fêtera son jubilé avec le peintre Thierry Bosquet
Sigiswald Kuijken parle de sa rencontre avec le célèbre peintre belge Thierry Bosquet.
J'ai connu Thierry Bosquet dans les années 1980 par l'intermédiaire de Philippe Lenaël, l'un des premiers metteurs en scène de théâtre et d'opéra à se spécialiser dans la mise en scène historique baroque. Ma rencontre avec Thierry m'a immédiatement bouleversé.
Thierry Bosquet (né en 1937 à Uccle) s'est avéré être une véritable âme sœur pour moi (et aussi pour ma femme Marleen) ! Il a derrière lui une longue et brillante carrière de peintre et de décorateur de théâtre, ayant travaillé dans de nombreux pays différents - et encore aujourd'hui, il peint presque tous les jours !
L'imaginaire de Thierry Bosquet est entièrement peuplé de personnages des XVIIe et XVIIIe siècles, habillés de leurs propres vêtements, avec leurs propres gestes et expressions. Ils nous montrent leur vie et leurs coutumes, leurs goûts, leur richesse et leur pauvreté, et avant même de nous en rendre compte, nous en ressentons les éternels échos dans notre cœur... Thierry est amoureux de cette beauté, de cette théâtralité, de ces boucles et froufrous qui faisaient partie de la vie de l'époque.
Ainsi, dans sa maison d'Uccle, il a réalisé une douzaine de décors de théâtre baroque en miniature, soigneusement et amoureusement assemblés et peints, comportant toutes sortes de personnages - à chaque fois dans un espace d'environ un mètre cube... Tout y vit et y converse, nous y sommes pour ainsi dire submergés... Il ne s'agit pas d'une "reconstruction" minutieuse, mais d'une fantaisie puissante, d'une énergie communicative, qui souffle sur toutes ces créations!
Le "baroque" éclate partout dans cette demeure pourtant simple: tout y est théâtral, arrangé et appliqué avec art - l'œil ne sait pas où regarder en premier. Même le modeste jardin contient de nombreuses sculptures baroques et classiques, comme on peut s'y attendre...
L'atelier de peinture proprement dit, situé à l'étage, est relativement petit. Partout, on trouve des dossiers contenant des gouaches (paysages, personnages, allégories, natures mortes) et des dessins pour des décors de théâtre.
Thierry ne cherche pas à recevoir beaucoup de visiteurs, il semble aimer d'être seul dans son royaume. En tant que visiteur, vous êtes le bienvenu, mais il n'est pas un guide exubérant dans son domaine ... Cette modestie le caractérise.
En 1993, nous lui avions demandé de créer les décors et les costumes pour l'opéra "I Disingannati " d'Antonio Caldara (un opéra pour le carnaval à Vienne en 1729, basé sur Le Misanthrope de Molière), que nous avons joué avec LPB au Festival de musique ancienne d'Innsbruck, dont Réné Jacobs était alors le directeur artistique. Je vois encore Thierry devant moi, là, dans le studio du Landestheater, occupé à peindre les costumes (eh oui !) dans son style fringant et baroque. C'était inoubliable et impressionnant - il était dans son élément! Plus tard, dans les années quatre-vingt-dix, il a peint sur une grande fenêtre dans notre maison à Asse: il travaillait parfois avec deux pinceaux en même temps - un dans chaque main ! De cette façon, les fleurs sont sorties de son cerveau imaginatif incroyablement rapidement...
En 2001, Thierry Bosquet a publié un beau livre sur "Versailles Disparu". Il y dépeint d'une part de nombreux bâtiments célèbres qu'on retrouve encore maintenant sur ce domaine incomparable, mais d'autre part aussi de nombreuses constructions et des vues qui n'existent plus de nos jours, mais dont témoignent des documents de l'époque...
Au printemps de cette année 2021, nous avons demandé à Thierry de créer un tableau pour le 50e anniversaire de La Petite Bande en 2022 - un tableau pour proposer à notre public, dans une reproduction de très haute qualité, afin de renforcer le fond financier de notre programme festif prévu. Sans aucune hésitation, il a accepté notre demande et, qui plus est, il nous a fait don de cette œuvre en espérant que l'orchestre puisse en bénéficier de façon significative ...tout ceci en raison de son affinité avec notre travail, et à l'occasion particulière de notre jubilé d'un demi siècle!
À la lumière de notre situation actuelle marquée du signe de la Corona, nous lui avons suggéré de glisser la devise "Musica Medicina Dolorum" dans son dessein - ce qu'il a accepté et réalisé avec beaucoup d'élégance...!